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J’en profiteLe 25 janvier 2024, le Conseil constitutionnel a rendu sa décision sur la Loi pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration
CC, 25 janvier 2024, n°2023-863 DC
Cette loi est issue d’un projet de loi déposé au Sénat le 1er février 2023, comportant à l’origine 27 articles.
Le 26 janvier 2023, le Conseil d’État a rendu un avis sur ce projet de loi. A son sens, aucune disposition ne posait véritablement de problème juridique.
En revanche, il a regretté que ce projet de loi ne soit accompagné d’aucune étude d’impact ni d’aucun diagnostic sur les règles déjà existantes et les difficultés de leur application.
De fait, il s’agit du huitième projet de loi majeur sur l’immigration en seize ans. Chacune de ces lois a ajouté à l’arsenal juridique. Au final, un droit complexe difficile à maîtriser tant pour les agents en charge de sa mise en œuvre que pour les intéressés. Sans compter que, pour le Conseil d’État, cela contribue à susciter la défiance ou l’incompréhension de l’opinion publique.
A cela s’ajoute que l’effectivité des mesures prévues va dépendre, surtout, des moyens – humains, matériels, techniques – mis en œuvre. Le Conseil d’État s’interroge donc également sur les moyens budgétaires qui pourraient être consacrés à l’application de cette loi.
L’examen de ce projet de loi n’a pas été sans heurts.
D’abord examiné au Sénat, le texte a été largement amendé – passant ainsi de 27 à 95 articles. Parmi les amendements adoptés, certains sont très controversés : réinstauration du délit de séjour irrégulier, majoration des droits d’inscription à l’université pour les étudiants étrangers, durcissement du regroupement familial ou encore suppression de l’aide médicale d’État…
Ce projet de loi – totalement remanié – a ensuite été examiné par l’Assemblée nationale qui a voté une motion de rejet.
Finalement, c’est une commission mixte paritaire qui s’est prononcée. La loi adoptée comporte 86 articles, conservant ainsi la majorité des amendements adoptés au Sénat. Seule la suppression de l’aide médicale d’État a été écartée, celle-ci devant être réformée en 2024.
Le Conseil constitutionnel a été saisi de 45 articles de la loi. 35 ont été censurés, dont 32 comme cavaliers législatifs et 3 au fond. 2 ont été assortis de réserves d’interprétation.
C’est donc principalement sur des questions de procédure que le Conseil constitutionnel s’est prononcé.
Un cavalier législatif est une disposition qui n’a pas de lien, même indirect, avec l’objet initial de la loi et qui, de ce fait, n’y a pas sa place.
Peuvent être sanctionnées sur ce fondement, aussi bien les dispositions initiales de la loi que les amendements adoptés par le Parlement. En effet, depuis la réforme constitutionnelle de 2008, l’article 45 de la Constitution dispose que « tout amendement est recevable en première lecture dès lors qu’il présente un lien, même indirect, avec le texte déposé ou transmis ».
Pour déterminer si une disposition est un cavalier législatif, le Conseil constitutionnel procède en deux temps : il commence par décrire le texte initial puis, pour chacune des dispositions, si elle ou non dépourvue de lien avec celui-ci.
En revanche, il ne statue pas au fond et ne contrôle donc pas la conformité du contenu de ces dispositions aux autres exigences constitutionnelles. Cela signifie que ces mesures pourraient être à nouveau adoptées dans une loi plus adaptée.
Parmi les cavaliers législatifs écartés de la loi, on trouve, notamment, les mesures suivantes :
Deux dispositions sont, du fait de leur contenu même, déclarées non conformes à la Constitution.
D’abord, l’article 1 qui prévoyait notamment :
Les requérants reprochaient à ces dispositions – notamment en ce qui concerne les quotas migratoires – de porter atteinte au droit de mener une vie familiale et au droit au respect de la vie privée. Il leur était également reproché de méconnaître le principe d’égalité devant la loi : les ressortissants étrangers seraient ainsi soumis à une différence de traitement selon qu’ils auront déposé leur demande de séjour avant ou après l’instauration des quotas.
Le Conseil constitutionnel n’examine toutefois aucune de ces questions.
S’il censure ces dispositions, ce n’est pas au regard des droits et libertés constitutionnellement garantis. Ce qui l’intéresse ici, ce sont les règles qui encadrent la fixation de l’ordre du jour des chambres du Parlement.
En effet, selon l’article 48 de la Constitution, il appartient à chaque chambre de fixer son ordre du jour en respectant les règles suivantes :
Autrement dit, la fixation de l’ordre du jour est partagée entre le Gouvernement et chaque Chambre du Parlement.
Le législateur, de son côté, n’a aucune compétence en la matière. Il en résulte qu’une loi ne peut pas imposer au Sénat et à l’Assemblée nationale ni la tenue de certains débats, ni la fixation d’objectifs chiffrés.
C’est donc au nom de l’autonomie du Parlement et de la séparation des pouvoirs que le Conseil constitutionnel censure cette disposition.
Ensuite, l’article 38 qui autorise le relevé des empreintes digitales et la prise de photographies d’un étranger sans son consentement.
L’article L. 142-1 du CESEDA autorise déjà le relevé d’empreintes digitales et la prise de photographie. En revanche, la loi ajoutait la possibilité de recourir à la contrainte si la personne concernée ne consent pas à ces relevés.
Le texte n’impose qu’une condition avant qu’un officier de police judiciaire puisse recourir à la contrainte : l’information préalable du procureur. En revanche, aucune autorisation n’est nécessaire. De même l’officier de police judiciaire n’a pas à motiver sa décision de recourir à la contrainte et n’a pas à justifier qu’il s’agit là de l’unique moyen d’identifier la personne. Le texte ne prévoit pas non plus, lorsque la personne concernée à demander à être assisté par un avocat, la présence de ce dernier.
Le Conseil constitutionnel ne censure pas en soi le recours à la contrainte. Il estime, au contraire, que le législateur poursuit un but légitime : il s’agit de lutter contre l’immigration irrégulière, ce qui participe de l’objectif à valeur constitutionnelle de sauvegarde de l’ordre public.
En revanche, il considère que la procédure telle qu’elle est prévue n’offre pas de garanties suffisantes et, de ce fait, est contraire à la liberté personnelle protégée par les articles 2, 4 et 9 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen et dont le Conseil constitutionnel rappelle qu’elle ne saurait être entravée par une rigueur qui n’est pas nécessaire.
Bien que largement amputée par la décision du Conseil constitutionnel, la loi « immigration », promulguée le 26 janvier 2024, comporte tout de même d’importantes mesures et, notamment :
En cas de non-respect de ce contrat, le titre de séjour peut être retiré ou ne pas être renouvelé.
Cette disposition a été soumise au contrôle du Conseil constitutionnel. Les requérants reprochaient, tout d’abord à cette disposition d’utiliser le terme de contrat pour désigner un engagement unilatéral et de définir de manière imprécise les obligations qu’implique pour l’étranger la souscription d’un tel contrat. Pour eux, il en résulterait une méconnaissance de l’objectif à valeur constitutionnelle d’accessibilité et d’intelligibilité de la loi. Ensuite, ils estiment que cette disposition restreindrait de façon disproportionnée la liberté d’opinion ainsi que la liberté de communication.
Le Conseil constitutionnel la déclare toutefois conforme à la Constitution. Il estime, en effet, que cette disposition est parfaitement intelligible et que le législateur peut imposer la souscription de cet engagement à un ressortissant étranger, qui n’est pas dans la même situation qu’un ressortissant français. Il ajoute qu’elle n’a pas pour vocation de restreindre la liberté d’opinion et la liberté de communication mais bien au contraire, de les renforcer.
Cette disposition n’a pas été soumise au contrôle du Conseil constitutionnel.
Cette disposition n’a pas été examinée par le Conseil constitutionnel.
Cette disposition est jugée conforme à la Constitution par le Conseil constitutionnel qui considère qu’elle ne porte atteinte ni au droit au procès équitable ni aux droits de la défense.
Le Conseil constitutionnel juge cette disposition conforme à la Constitution, estimant que le législateur a assuré une juste conciliation entre, d’une part, l’objectif à valeur constitutionnelle de prévention des atteintes à l’ordre public et, d’autre part, la liberté d’aller et de venir, le droit au respect de la vie privée et le droit de mener une vie familiale normale.
Le Conseil constitutionnel ne s’est pas prononcé sur cette disposition.